(Enquêtes
de G. Détrez, G. Gleizes, J. Remondelli. Photos J.-M. Viala, J. Remondelli, C.
Sarazin, L. Ringot. Adaptation W. Henneau). | M.
René Lestienne, employé au Secrétariat des Travaux du Fond du Groupe de
Lens :
« C'était en 1944, j'étais détenu en Allemagne. J'avais déjà tenté
de m'évader plusieurs fois, mais toujours en vain. Ce soir-là, excédé par tout
ce que nous avions à endurer, je profitai d'un moment d'inattention de nos gardiens
occupés à « rosser » un camarade, pour tenter une autre « belle ». |
 |
La neige, le froid, la faim, tout était préférable pour moi à la vie de camp,
et j'étais bien décidé à en finir, d'une façon ou d'une autre. Je parvins à mes
fins, et pendant un mois, je parcourus plaines et bois couverts de neige, mangeant
ce que je trouvais... quand je trouvais quelque chose, vivant comme une véritable
bête. Un soir, je m'apprêtais à pénétrer dans une agglomération, quand commença
un très violent bombardement. Je me trouvais en plein dedans. |
N'y
voyant presque plus, suffoquant sous la poussière, les oreilles prêtes à claquer,
je m'étais à peine aperçu de l'arrêt du bombardement, que deux feld-gendarmes
me passaient les menottes. J'étais à quelques kilomètres seulement de la frontière
française... On me mit donc en prison, et dans ma cellule, j'entendis très vite
un bruit de cloches. Peu de temps après, la porte s'ouvrit, le gardien me regarda,
non avec méfiance comme d'habitude, mais avec un large sourire, et me présenta
une bassine de toilette pleine de nourriture, en me disant : « Joyeux Noël ».
Vous ne pouvez pas vous imaginer ce que j'ai éprouvé à ce moment-là ». |
|
|