Loos-en-Gohelle
: les deux célèbres terris du 11/19. En dehors des sorties organisées
par la Chaîne Des Terrils, quelques dates où l'accès est autorisé
permettent de réaliser des promenades buissonnières sur ces larges
flancs. Voici la description de l'une d'elles effectuée au moment de la
manifestation "Festivole" (début Août 2001). |
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On indique une hauteur de 186 m pour l'un des deux terris. Un chiffre ridicule
lorsqu'on le compare aux plus petits monts des massifs montagneux européens.
Ce n'est pas dans les données officielles qu'il faut chercher le vertige
mais bien sur les lieux. Déjà, en approchant de Lens par la rocade
minière, ils apparaissent au loin, écrasants, monstrueux. Ensuite,
une étrange illusion d'optique les fait fuir au fur et à mesure
que l'on s'en approche. Arrivé au pied du premier, le sommet curieusement
invisible parait inaccessible. |
Chaussures
de marche lacées, sac au dos, l'ascension peut commencer. Une fois sur
le chemin qui longe les pentes si lisses vues de loin, celles ci se gondolent
en de multiples dunes obscures tout au long de la progression. Ce phénomène
illustre le handicap de ce genre de lieux, d'un monde aux attraits cachés,
victime d'une image injustifiée. Lové dans un creux, au contact
de la "paroi" dont la chaleur irradie le corps, on se retrouve alors
coupé du monde '"extérieur". La densité urbaine
et les cultures intensives ont disparu. |
Désormais
tout autour, les éléments mouvants subissent la loi des conditions
atmosphériques. Ainsi, au gré d'une bourrasque de vent, de petites
particules s'envolent comme autant de traces de passages d'elfes invisibles ou
autres créatures magiques. De temps en temps, sous les rayons brûlants
du soleil, des éléments se détachent et dégringolent
sur la pente avec un léger bruit de source espiègle. |  |
En
levant les yeux, la vue des nuages qui défilent anormalement confirme que
l'on se trouve un peu plus prés du ciel. Paradoxalement, l'exploitation
du charbon qui s'est produite à des centaines de mètres sous terre,
utilisant si possible une |
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population que l'on voulait soumise et obéissante, nous a laissé
comme souvenir ces chevalets et terris qui obligent à relever la tête.
Peut-être y a-t'il un rapport avec le désir de ces nouveaux et trop
nombreux chefs d'entreprise, voulant s'installer dans la région, de dégager
l'horizon... Par endroits, ce sont les ronces qui rendent l'endroit beaucoup moins
confortable. Souvent, les deux friches industrielles et végétales
ce confondent. Ce vieux câble rouillé, semble sortir subitement de
la broussaille pour apparaître lui aussi en pleine lumière. Mais
après avoir fait quelques centaines de mètres sur les pentes , quel
plaisir de s'arrêter pour en cueillir les mûres ! |
Même
à proximité du sommet, on découvre encore des objets massifs
comme ce rail allongé sur le schiste. Petit à petit, identique à
l'action de la marée sur une plage, l'érosion découvre diverses
"épaves" : traverses de bois, débris métalliques,
poutrelles en béton... Et si vous rencontrez, un jour, quelque hère
qui arpente inlassablement les lieux, il vous confira peut-être son rêve
secret de faire fortune en y dégageant une caisse de vieilles lampes .
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Du côté ouest, puissant et régulier, le vent assaille, rend
plus difficile la progression. Il en est de même pour les plantes qui ont
du mal à s'accrocher sur cette partie. Les appuis sont moins sûrs,
le pied dérape, s'enfonce dans le schiste qui s'introduit immédiatement
dans la chaussure ! Plus loin sur le retour, cet objet échoué ne
vaut certainement pas grand chose commercialement parlant, pourtant il est menacé.
Témoin d'une époque et d'une industrie, source d'interrogations
et de questionnements sur sa vie lorsqu' il était encore aux mains des
mineurs, l'administration ne le regarde pas du même il. Objet tranchant,
inutile, donc dangereux, il doit être éliminé. |
Ainsi décide t-on que les seuls machines et outils dignes d'intérêt
pour le "public" sont ceux qui figurent dans les musées, si possible
derrière une vitrine, dégraissés, conservés sous trois
couches de peinture. |
Et
si quelqu'un décidait qu'après tout, ce morceau de ferraille est
bien où il est ? Que même s'il est moins bavard, il respire plus
l'authenticité que ses compagnons exhibés au CHM ? Qu'ici au contraire,
on peut toucher et même si on se fait mal, et bien il fallait faire attention
? que cette tôle rongée par la corrosion évoquant des taches
organiques c'est plus chaleureux que le bleu électrique choisi par le Conservateur
? Non, il y a fort à parier que l'on ne l'écouterait pas. Ce n'est
pas sérieux. |  |
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Même si elle est loin d'être "parfaite", la sauvegarde des
lieux, n'a pu se faire sans concession. C'est ainsi qu'en deçà du
plateau, côté nord, ces installations lunaires finissent la démolition
de deux autres cônes réduits aujourd'hui à néant...
Enfin, après en avoir fait trois fois le tour, y être monté
et redescendu autant de fois, "éreinté" pour le reste
de la journée, on se dit malgré tout : à quand la prochaine
? ¤ | | |