Le terri d'Estevelle, situé prés du carreau des anciennes fosses 24 et 25 des mines de Courrières, est un des plus imposants de Gohelle. Un "monument" incontournable au milieu de cette étrange plaine.
Les grands terrils - St Étienne - 9 de Oignies - Rouvroy - Evin-Malmaison - Loos-en-Gohelle - Estevelles - Fouquières
Plus de chevalets au milieu du carreau de la fosse 24. De chaque côté, les bureaux, ateliers et bains-douches sont encore présents. Mais le grand projet du site serait aussi...la démolition.
Actuellement une entreprise occupe les lieux. Un responsable accueillant autorise le stationnement et décrit succinctement la situation. Malheureusement, derrière la grille, un enchevêtrement indescriptible s'offre au regard, à mi-chemin entre la casse de voitures et la récupération de déchets.
Au bout des ateliers, un chemin mène au célèbre terri si reconnaissable grâce à sa forme trapézoïdale, ses traits durs, sa couleur fort sombre. Celui-ci apparaît d'autant plus écrasant qu'il est visible en pleins champs, notamment de la route de Carvin à Lens. Pourtant de ce coté, l'aspect plus vallonné, la végétation plus dense, la présence de randonneurs paisibles malgré le panneau "DANGER CHUTES DE PIERRES" hors d'âge, font douter de l'identité du lieu.

Le sentier, qui mène au sommet, zigzague sur la pente parmi des églantiers agités par le vent. Par endroits, de vastes zones sont recouvertes de nombreux blocs de "querelles" ( grès houiller).

Ces pierres qui constituent une masse importante de ce terril, il a fallu jadis les extraire en se servant de foreuses, d'explosifs... C'est la poussière de ces roches qui est à l'origine de la trop célèbre silicose. Du coté nord, les blocs sont si nombreux qu'on ne peut s'empêcher de se remémorer cette époque d'après guerre, vers les années 50.

Souvenez vous, c'était le temps des "concentrations". Il fut décidé de mettre en réseau des groupes de puits avec l'un d'entre eux dit de "concentration", grâce à des voies souterraines. Le puits de "concentration" avait alors pour fonction de réceptionner la production des différents chantiers.

Pour réaliser ces voies appelées "bowettes", il fallait bien sûr des hommes. Des hommes condamnés à une maladie terrible les conduisant tous à une mort certaine. Pour inciter les "vocations", Charbonnage De France proposait des salaires les plus attractifs du bassin.

La pression patronale a tenté bon nombre de mineurs. Une fois dans l'équipe, il fallait aller vite. Pour que la voie avance, pour relier rapidement les puits, afin d'augmenter la productivité, CDF instaurait des cadences jamais atteintes auparavant...

Aujourd'hui, le silence des lieux, la vue de ces champs de roches froides, immobiles, massives évoquent l'hécatombe qui en a résulté.

Aucun mémorial, aucun musée ne pourrait remplacer cette sensation de présence de ses hommes que nous procure ce lieu. Toucher ces mêmes pierres, voir ces empreintes de trou de mine un peu partout, comme si elles avaient été tirées hier est encore possible.
La ferraille : boulons, pièces métalliques, les tapis en caoutchouc ont, quant à eux, pris un coup de vieux. L'exploration des flancs très riches amène de découverte en découverte. Fossiles, blocs de schistes en décomposition (photo 4) , plantes pionnières (photo 3) sollicitent l'oeil de toute part. Un impératif : ne rien dégrader.
Au sommet, on arrive sur le plateau du trapèze : plate forme nue au ciel bas, sans horizon. Lorsque l'on se rapproche du bord sud-ouest pour admirer la vue, le vent puissant, lancé dans la plaine de Gohelle, vous rencontre comme un obstacle sur sa route. Des bourrasques semblables à autant de vagues lancées sur la côte un jour de tempête nous claquent à la figure et nous repoussent vers l'intérieur.
C'est à l'opposé sur les pentes du nord-est que l'on retrouve le calme. Cet oiseau apparemment épuisé ou hébété semble lui aussi profiter de l'absence de vent pour reprendre des forces avant de continuer sa route. Ce gracieux sureau qui joue aux ombres chinoises est l'un des rares à s'aventurer aussi haut. Mais sera t'il encore là dans l'avenir ? Et que restera-t'il de ce terri après les inévitables aménagements ? ¤
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